mercredi, avril 24, 2024
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Les pièces de rechange, se digitalisent. Un nouveau défi du marché européen

Selon une récente étude menée par le cabinet Roland Berger, la reprise du marché européen de la pièce de rechange est attendue pour 2022. Le marché devrait peser pas moins de 190 milliards d’euros, soit à peu près son niveau d’avant crise du Covid, effaçant ainsi la baisse de 13% enregistrée en 2020. Toutefois, les experts du cabinet alertent sur la transformation de la structure de marché, avec la prolifération d’opérateurs digitaux.

Le secteur européen de la distribution de pièces de rechange a retrouvé son dynamise cette année, d’après une enquête du cabinet Roland Berger. Une reprise qui devrait se confirmer en 2022, avec un chiffre d’affaires attendu de 186 milliards d’euros, se rapprochant de son niveau de 2019. Cette croissance devrait se poursuivre jusqu’en 2030, selon les prévisions établies par le cabinet qui s’attend à un rythme de croissance soutenue, portant le chiffre d’affaires de la filière à 221 milliards d’euros.

L’inflation des prix des pièces ainsi que la progression du parc automobile devront booster la croissance du secteur. Celui-ci restera à l’abri de l’impact des « mégatendances » (connectivité, électrification, autonomisation de la conduite et nouvelles mobilités) au cours des huit prochaines années.

En revanche, l’impact de la crise sanitaire sur les habitudes des Européens et de leurs choix en termes de mobilité, reste difficile à estimer. Matthieu Simon, associé au cabinet Roland Berger concède que dans le contexte actuel, il est difficile de savoir si la crise induira un changement des besoins de mobilité, précisant toutefois que l’automobile profitera d’autres phénomènes comme le flight shaming (la honte de prendre l’avion).

Arrivée de nouveaux acteurs

Les opérateurs web investissent le marché des pièces de rechange.

Le marché indépendant des pièces de rechange (IAM) profitera particulièrement de cette croissance attendue et ce, malgré la concurrence des constructeurs automobiles. Un constat du cabinet Roland Berger qui relève que la filière affiche une résilience au cours des deux dernières décennies, en augmentant sa part de marché de 50% en 2000 à 64% en 2019. Celle-ci devra atteindre 68% en 2025 et 70% en 2030, selon les projections du cabinet.

Les opérateurs de l’IAM devront ainsi consolider leurs positions grâce à une montée en gamme en matière de qualité de services dans les garages ainsi qu’une réglementation plus favorable notamment la révision du règlement d’exemption par catégorie. L’arrivée d’opérateurs e-commerce et la digitalisation constituent également une opportunité pour les opérateurs historiques de la filière, à en croire les rédacteurs de l’enquête de Roland Berger.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les fabricants d’équipement d’origine (OEM) n’ont pas dit leur dernier mot. Le cabinet Roland Berger s’attend à une offensive des constructeurs automobiles boostée par l’électrification et le logiciel embarqué. Les IAM sont aussi bousculés par les nouveaux acteurs du e-commerce multiproduits (groupements d’achats internationaux, agrégateurs de services, distributeurs offline/online, etc.), attirés par les marges du marché des pièces de rechange.

Positionnement renforcé des acteurs du web

Le marché des pièces de rechange se digitalise

En se basant sur les révolutions qui touchent l’industrie automobile particulièrement la filière de l’après-vente, à la fois technologique (électrification des véhicules, connectivité) et en termes d’évolution des usages liés à la pandémie, le cabinet Roland Berger a établi 4 scenarios d’évolution du marché de l’après-vente.

Dans le premier scénario, l’IAM renforcera sa position sur le marché et de nouveaux géants de la pièce de rechange émergeront en Europe au détriment des acteurs de l’OEM. Plusieurs marchés européens observent d’ores et déjà un mouvement de concentration dans l’IAM.

Le deuxième scénario de Roland Berger décrit une tendance inverse avec une montée en puissance des constructeurs. Le cabinet mise sur une prise de part de marché grâce à la connectivité et l’électrification des véhicules qui pourraient être utilisées comme levier de contre-attaque, au vu des périodes de garantie plus longues sur plusieurs types de pièces dont la batterie. Les constructeurs pourraient aussi créer du leasing long terme (de 0 à 10 ans), leur permettant de gagner des parts de marché sur l’après-vente et de contraindre les indépendants à recourir à des alliances au risque de disparaître. 

Le 3ème scénario esquissé dans l’étude du cabinet repose sur l’éventualité d’une nouvelle stratégie menée par les différents acteurs du secteur (IAM et OEM) consistant à trouver des schémas d’alliance dans les domaines de la logistique, des achats, du stockage…etc. afin de s’adapter aux nouveaux paradigmes technologiques et d’usage et faire face aux nouveaux acteurs digitaux.

Les indépendants, équipementiers et constructeurs doivent désormais composer avec de nouveaux acteurs qui prolifèrent sur le web, parmi eux les marketplaces, ce que le cabinet identifie comme « barbares ». Dans son 4ème et dernier scénario, ces acteurs de B2C et B2B à l’instar de Amazon, Alibaba et Autodoc, risquent de bousculer le marché, en créant de plus en plus des partenariat en Europe.

Le terme « barbares » est évocateur selon Matthieu Simon : ils sont très connus et financés par des activités beaucoup plus larges en dehors de l’automobile et n’ont donc pas besoin de réaliser des profits très élevés. La logistique, l’exploitation de la data consommateur et le digital sont également des points forts. Avec une logique centrée sur le consommateur, ils viennent répondre à des points problématiques « pain points », à des coûts 20 à 30% en dessous de ceux appliqués par les indépendants et les constructeurs.

Aujourd’hui, l’accès par ces nouveaux acteurs au marché européen n’est pas acquis, en raison de multiples barrières en place. Ceci dit, certaines marketplaces essayent de prendre des positions stratégiques « Les barbares peuvent aussi pénétrer le marché par d’autres canaux. Je pense au booking de garages, par exemple », précise Matthieu Simon.

Un marché de plus en plus fragmenté

Difficile pour Matthieu Simon de déterminer avec certitude le scénario d’avenir de l’après-vente automobile à horizon 2030. Une chose est sûre, les acteurs du marché doivent se positionner rapidement sur le digital et nouer des accords afin de préserver leur activité. Cela leur permettra d’accroître leur efficacité, prendre des positions stratégiques et innover dans les services. « L’empilement des maillons dans la chaîne de distribution et des marges favorisera l’arrivée des barbares », conclut l’expert de Roland Berger.

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